La saturation des cimetières n’est pas un sujet nouveau. En effet, les premiers signes de saturation remontent au 19e siècle. Dès les années 1850, dans la ville de Paris, les communes avaient dû créer six autres cimetières, à ajouter aux grosses nécropoles de la capitale. Ils se trouvaient dans l’actuelle petite couronne : en Seine-Saint-Denis (La Chapelle, Saint-Ouen, Pantin), dans le Val-de-Marne (Ivry, Thiais) et Hauts-de-Seine (Bagneux). Depuis la délégation du service public, c’est aux communes de répondre à cette épineuse problématique. Et, un peu à l’image du réchauffement climatique, c’est lorsque la crise atteint son apogée qu’e’on commence à prendre des mesures.
Comment en est-on arrivé à une saturation de certains cimetières ?
Il existe plusieurs raisons au fait que certains cimetières subissent une saturation :
Premièrement, jusqu’en 2007 les concessions funéraires vendues aux familles étaient toutes des concessions perpétuelles. Le Père Lachaise par exemple, possède plus de 90 % de concessions perpétuelles. Les années passant la place est venu à manquer dans les cimetières qui n’ont, eux, pas grandi.
Michel Kawnik est président de l’Association française d’information funéraire. Selon lui, en 2017, seulement 171 places dans les 14 cimetières intra muros de Paris se libéraient. Alors que cette année-là, on comptait 5000 demandes.
Deuxièmement, la saturation est due à une densification de la population dans certaines villes. Mais aussi, et surtout ces dernières années, à une densification des morts, due notamment à l’épidémie de Covid 19. À titre d’exemple à Montreuil, le nombre d’inhumations avait connu une augmentation significative, augmentant parfois jusqu’à deux ou trois fois, comme l’avait souligné à l’époque Thierry Manteau, responsable technique au cimetière de Montreuil. Bien que le cimetière, qui était de grande taille, disposait encore d’espace, le personnel disponible était insuffisant. Les travailleurs devaient demeurer toute la journée pour enchaîner les travaux de creusement en série. En parallèle, la municipalité de Montreuil avait dû prendre des mesures pour aménager des sépultures temporaires destinées aux défunts qu’il était impossible de rapatrier vers leur pays d’origine.
Pour finir, autrefois l’entretien et l’organisation du cimetière sont une des missions des communes. Hors c’est un service coûteux, qui nécessite de la main d’œuvre, les communes peinent déjà financièrement à s’occuper de cette gestion. Pour désengorger certains cimetières, une des solutions serait la création de nouveaux cimetières ou l’expansion de ceux existants. Mais cette démarche serait trop onéreuse d’autant qu’elle dépend du foncier.
Quelles solutions sont envisagées pour faire face à la pénurie de concessions ?
La première solution et la plus évidente serait d’agrandir, voire d’ouvrir de nouveaux cimetières. C’est une solution qui fonctionne dans certaines petites communes. Mais cette solution n’est pas accessible aux grandes villes, et n’est pas très pérenne.
Depuis 1996, aucune municipalité en France n’accorde de concession perpétuelle. Les proches des défunts doivent donc louer les espaces funéraires pour des durées limitées. Les concessions sont désormais de 10 ans, 30 ans ou 50 ans. C’est une solution qui permet, petit à petit, de récupérer les concessions déjà occupées dans les cimetières.
En 2020, une vaste initiative a été lancée dans les cimetières historiques de Paris. Son but d’identifier et de remettre en état les concessions abandonnées. Cette démarche implique une procédure étendue de reprise des concessions à perpétuité. Au cours des trois ans, plusieurs familles ont reçues des notifications d’abandon. En l’absence de réponse, une liste des concessions concernées est soumise à un processus administratif de reprise. Celui-ci est ensuite publiée dans le Bulletin officiel.
Les responsables des sépultures de la Ville de Paris peuvent alors exhumer les restes mortels. Ils sont ensuite déposés dans l’ossuaire de Paris en fonction de leur cimetière d’origine. Dans les cas où ces concessions comprennent des monuments historiques, des marbriers restaurent les structures. Elles sont ensuite transformées en columbariums ou accueillent plusieurs caveaux avec des concessions de trente ans.
La dernière solution trouvée est la mise en place d’un double accompagnement des communes par le SIFUREP (Syndicat funéraire intercommunal funéraire de la région parisienne). Le Syndicat propose à la fois la mise à disposition d’une centrale d’achat pour faciliter un accès plus égalitaire. Et à la fois il offre une assistance juridique pour permettre aux communes de mieux gérer leurs cimetières. En effet, certaines communes se retrouvent face à la peur d’avoir des contentieux avec les ayants-droits. L’enjeu de cet accompagnement est principalement d’aider les communes dans la reprise de concession. L’objectif esr de leur permettre d’avoir toujours des concessions libres, qui est de surcroit une obligation de leur part.