Interview de Juliette Cazes, auteure du livre « Funèbre ! »

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Photo Juliette Cazes

Est-ce que tu peux nous parler un peu de ton parcours jusqu’ici ?

J’ai commencé par faire des études d’anthropologie et d’archéologie, puis des études de tourisme.

Avant d’avoir mon diplôme, j’ai obtenu mon premier emploi où je suis restée 5 ans : de 2015 à 2020, j’ai été logisticienne d’expédition scientifique, ce qui m’a permis de voyager et de creuser mon intérêt et mes recherches en archéologie et en anthropologie, notamment autour des rites funéraires, mais de façon plus globale autour des cimetières, du patrimoine funéraire…

En parallèle en 2017, je décidais de vulgariser un peu tout ce que j’apprenais dans mes recherches, d’abord sur YouTube puis sur Twitter. Depuis 4 ans, j’anime un site, un compte Youtube et un compte Twitter : Le Bizarreum, qui vulgarise les pratiques funéraires. 

Depuis la crise de la Covid je suis devenue indépendante, et en décembre dernier j’ai aussi passé mon diplôme de conseiller funéraire maître de cérémonie. Pas forcément dans le but de devenir conseiller funéraire, principalement dans le but d’approfondir mes recherches, je trouvais important de connaître l’approche contemporaine des rites funéraires. 

Pourquoi cet intérêt pour la mort et les rites funéraires ?

C’est venu très tôt. J’ai toujours tout fait pour travailler sur ces sujets-là. C’est une passion dévorante, je voulais devenir archéologue et être au contact des momies, de sépultures. C’est une vision restreinte de l’archéologie, mais c’est ce qui m’a motivée. En approfondissant, j’ai réalisé la diversité du sujet, j’ai compris qu’il y avait plein de possibilités plein de sciences autour. Ce sont des sujets que l’on peut approfondir sans fin, et vous faites toujours des rencontres qui viennent approfondir la réflexion, c’est infini.

Tu as écrit un livre : Funèbre !  Peux-tu nous en parler ?

J’ai toujours voulu publier. Je pensais même arrêter Le Bizarreum dès que je publierai un livre. Mais finalement le livre est venu très vite. Le but n’était pas de faire un travail scientifique, mais de parler à tout le monde peu importe son bagage. J’ai simplifié l’information sans la dénaturer. On se rend compte qu’il y a plein de sujets, l’économie, la politique, l’écologie qui interviennent dans la mise en place du rite funéraire. 

Comment as-tu rassemblé toutes les informations ?

Depuis 2009, première année de mes études, je n’ai jamais arrêté de compiler. Je faisais mes propres recherches, mon propre corpus, j’essayais d’appliquer les protocoles que j’avais appris à la FAC, pour regrouper le plus possible. Ensuite, il y a tout l’aspect terrain, loin de la théorie qui m’a permis de rassembler beaucoup de notes.

Certains rites n’ont pas été ajoutés au livre, mais j’ai travaillé par exemple en Ethiopie où j’étais dans des régions très isolées, j’ai tout noté, surtout grâce aux rencontres. J’avais vraiment envie de mettre à profit ce que j’ai appris ces dernières années. Le plus gros travail a finalement été de synthétiser toutes ces informations, le livre aurait pu être beaucoup plus compliqué.

Quel est ton rituel préféré ?

Il y en a plein que je préfère ! Mais j’aime particulièrement le culte des crânes à Naples dans le cimetière Fontanelle. J’aime bien ce rapport au corps directement, un rapport à l’ossement. Il y a plusieurs rituels qui concernent les crânes, comme en Bolivie par exemple où on retrouve des systèmes d’adoption de crânes. Tous les rites qui traitent de l’approche physique et biologique du corps. Au Mexique à Pomuch on va même jusqu’à nettoyer et sortir les ossements à l’occasion d’El dia de los muertos. 

L’autre exemple, c’est le rite du Tibet. Probablement parce qu’il est très éloigné de nos codes à nous. Les inhumations célestes ou jhator où les corps sont découpés et donnés à manger aux vautours. Tout cela s’explique, mais du point de vue occidental cela peut-être très choquant. Dans mon livre par exemple, j’explique pourquoi ce rite existe et pourquoi il est menacé. Ce qui est alarmant quand on constate la place du rite funéraire dans une société. 

On me demande souvent d’ailleurs ce que je trouve le plus bizarre dans mon travail, je réponds toujours que ça n’est jamais bizarre, c’est simplement que culturellement, c’est éloigné de nous.

Ghat de crémation au Népal, à Katmandou

Qu’est-ce que la société gagnerait à parler plus de la mort ?

Si les gens acceptaient plus facilement de se renseigner sur le sujet ou d’en parler entre eux, l’étape de la mort et des pompes funèbres seraient beaucoup moins troubles pour eux. J’ai reçu beaucoup de témoignages de gens qui sont très inquiets de savoir ce qu’il leur arrivera après leur mort. On peut déjà expliquer les choses simplement sans choquer. Aussi, pour beaucoup, c’est contre-nature de parler de la mort, il préfère se concentrer sur la vie. Mais l’un ne va pas sans l’autre : si on en accepte un, il faut accepter l’autre. On aura toujours peur de la mort, ça nous fera toujours du mal. Mais mieux la connaître, ne serait-ce qu’au niveau de l’organisation des funérailles, ou même du point de vue biologique, comme lors de la décomposition du corps, est bénéfique. En connaissant mieux un sujet, on est mieux préparé et on a moins peur.

Personnellement, je reste effrayée par la perte de mes proches, mais je suis beaucoup plus à l’aise avec tout le protocole de la mort. Je sais déjà ce que je veux pour moi-même. J’ai même l’impression que depuis que je travaille de façon assidue dans le sujet, mes deuils ont été un peu plus simples.

Est-ce que tu as déjà prévu tes obsèques ?

Oui, ça fait longtemps que j’y pense. Je suis beaucoup les nouveautés en termes de législation et de possibilité. J’ai notamment changé d’avis sur la crémation, du fait d’avoir travaillé dans un crématorium. Mais je sais dans quoi je veux investir pour ma vie post-mortem. J’ai aussi anticipé ce que je voulais au niveau du don d’organes par exemple.

Lien vers le livre de Juliette Cazes : FUNEBRE ! Tour du monde des rites qui mènent vers l’autre monde

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