Depuis des décennies, les rituels qui entourent la mort sont en perte de vitesse. La plupart des humains meurent à l’hôpital, on ne veille plus les morts à la maison. Aussi, de plus en plus de famille ont recourt à la crémation, les morts n’ont plus de sépulture. Les familles se retrouvent donc sans lieu de recueillement, jugé inutile ou comme une perte de temps. Même si de nombreux projet émerge de manière à redonner sa place à la mort, cette volonté de ne pas dépenser de temps pour nos morts témoigne d’une grande difficulté de notre monde à »voir la mort en face ». C’est un peu dans ce courant qu’on émergé de nouveau projet technologique, avec pour objectif de faire vivre grâce à l’Intelligence artificielle des personnes décédées. Ces innovations d’un secteur qu’on nomme la death tech, ont vu le jour chez nos voisins asiatiques.
Re;memory, la start-up sud-coréenne qui permet d’avoir une conversation avec un mort
Chaque année depuis 1967 se tient à Las Vegas, le CES pour Consumer Electronics Show. L’objectif du CES est de mettre en lumière des innovations technologiques. Certaines révolutions technologiques comme le magnétoscope (dans les années 70), l’ ordinateur, le caméscope, le lecteur CD, le lecteur DVD (dans les années 80) y ont été exposé. Dans les années 1990, le salon a présenté la télévision HDV, le format Blu-ray, les drones… Aujourd’hui, même si les révolutions numériques se font moins régulières (Les géants de la tech comme Apple ou Amazon font leur propre couverture médiatique) le salon reste un incontournable pour quiconque est passionné de technologie.
Au CES 2023, une start-up soulève des questions. Véritable révolution pour les uns, questionnement éthique pour les autres. L’entreprise Re;Memory propose un service basé sur une intelligence artificielle très performante qui permet d’avoir une dernière conversation avec un proche disparu.
Les développeurs de Re;memory ont créé une intelligence artificielle capable de reproduire les visages, voix et expressions faciales des morts. L’outil va étudier une sélection de photos et vidéos données par la famille du défunt, pour le matérialiser grâce à des images de synthèse 3D très réalistes. Les équipes réalisent également une pré-interview du défunt pour étudier son intonation et rendre l’échange virtuel encore plus réaliste.
La mort défiée par un jeune ingénieur chinois
A Nankin, à l’ouest de Shangai, Sun Kai, jeune ingénieur, a mis au point une nouvelle façon de dialoguer avec les morts. Il voulait revivre quelques instants avec sa mère récemment décédée. Selon lui, ça lui a fait beaucoup de bien : « j’étais excité et soulagé. Je me sentais coupable de ne pas avoir passé assez de temps avec ma mère avant son décés, et d’avoir consacré trop de temps à mon travail. Quand j’ai entendu ses premières paroles, j’ai eu l’impression de moins me sentir coupable, d’avoir trouvé un moyen de parler à ma mère et de l’entendre me demander par exemple si j’ai bien mangé aujourd’hui. J’espère que bientôt, elle sera capable de communiquer non seulement avec moi, mais aussi avec mes enfants. »
Il a ensuite créé la Nanjing Silicon Intelligence, pour laquelle il fait travailler 500 salariés. Le service a déjà permis de créé des milliers d’avatars qui font vivre les personnes disparues. En pratique, il explique que : « Pour copier l’apparence physique, nous avons seulement besoin d’une vidéo de trois minutes de la personne qui parle tout en faisant des gestes naturels et habituels. Pour le son, nous avons besoin d’une dizaine de minutes d’enregistrement audio. Tout ça prend seulement quelques jours…. Pour le clonage de la pensée , c’est un processus qui est plus progressif. Plus nous avons de matière, plus il y a de ressemblance avec la personne décédée. Au fur et à mesure que nous accélérons le développement de notre technologie, le dialogue est de plus en plus élaboré ».
L’intelligence artificielle pourrait aussi permettre aux défunts d’assister à leurs propres obsèques. C’est le projet fou de Li Jingheng, l’un des dirigeants d’un grand cimetière de la banlieue ouest de Shanghai. D’après lui toute personne mérité d’être préservée après sa mort. Pour l’instant le concept n’en est qu’à ses débuts, mais la motivation des dirigeants du cimetière de Shangai est grande. Le tarif pour créer un profil numérique démarre à 2000 euros. C’est un marché qui s’annonce prometteur, quand on sait que 10 millions de personnes meurent chaque années en Chine.
« Un procédé qui bloque le processus de deuil »
Luce Des Aulniers, docteure en anthropologie à Québec s’est exprimée à la radio pour exprimer sa crainte. Pour elle, ce procédé d’intelligence artificielle participe à un fantasme vieux comme le monde. Garder les morts près de soi, voire tenter d’éviter la mort sont deux idées qui ont toujours été présentes dans nos sociétés. Mais il s’agit ici, via l’intelligence artificielle, de créer une représentation de l’autre. Il s’agit d’une forme d’art, puisqu’on ne peut pas garder l’autre près de soi dans la réalité. De fait, c’est un procédé qui fait reculer le processus de deuil qui est justement le fait d’arriver à créer une représentation de l’autre à l’intérieur de soi.
Le processus de deuil, c’est aussi le fait de négocier la bonne distance avec un mort, de trouver une juste place pour les morts qui commence par la séparation physique. L’enjeu serait de trouver comment faire vivre l’autre à l’intérieur de soi, plutôt que par le biais d’un objet. Luce Des Aulniers ajoute que ce processus de deuil est universel, que de telles créations vont de pair avec l’envie de ne pas ressentir la douleur, mais que malheureusement, lors d’un deuil, la souffrance est inévitable, et l’intelligence artificielle n’y changera rien.
La death tech en France
Depuis quelques années, la tech s’intéresse au secteur funéraire. Les start-ups de la death tech ont pour objet de révolutionner le funéraire, grâce au digital. Dans notre pays, l’objectif est plutôt de faciliter les démarches après décès, de réduire les coûts liés aux obsèques ou d’aider les personnes à traverser le deuil. Les projets qui ont retenu l’attention des médias ces dernières années sont :
- Requiem Code, une start-up présentée durant l’émission “qui veut être mon associé”. Elle permet de créer un QR code relié à la biographie du défunt à sceller sur sa pierre tombale.
- InMemori, une entreprise de pompes funèbres uniquement en ligne.
- Repos Digital, une start-up qui permet de clôturer les comptes numériques des personnes décédées. Elle récupère l’argent et les biens qui reviennent à la famille.
- Memerio, est une plateforme d’e-commerce qui permet d’acheter des monuments et des objets funéraires en ligne. La start-up donne une seconde vie aux monuments en fin de concession. Elle met en relation des collectivités et des mairies, avec des acheteurs.
- Alanna, une start-up qui a pour objectif de réunir les personnes endeuillées grâce à un espace unique et privé. Une sorte de Facebook après décès.
- Outre-Manche, la start-up DeadHappy, propose un service d’assurance vie couplé à un service notarial. Elle incite à exprimer ses dernières volontés, aussi extravagantes soient-elles !
La maison Cridel n’a pas attendu la tech pour être innovante.
Notre ADN est d’accompagner les familles dans l’organisation d’un événement doux et mémorable qui célèbre la vie du défunt. Notre volonté est de performer dans le soutien que nous apportons aux familles. Nous n’avons donc pas pour vocation d’innover, si ce n’est dans nos relations humaines. Cependant, nous n’avons pas attendu le secteur de la tech pour digitaliser le funéraire. Depuis sa création en 2017, notre site propose plusieurs services, qui représentent un gain de temps et de charge mentale. Cela participe donc à notre volonté d’être des béquilles dans ces instants qui suivent la mort.
Nous avons par exemple les avis de décès en ligne. Ils permettent d’obtenir tous les détails sur le lieu et l’heure de la cérémonie. Sur les avis de décès en ligne, vous pouvez déposer un message de condoléances à la famille et acheter des fleurs qui seront directement livrées lors des obsèques. Notre service d’achat de fleur en ligne pour le cimetière, est actualisé aux quatre-saisons. Nous proposons aussi un service d’entretien de tombes, à commander en ligne sur notre site internet. Nos pompes funèbres travaillent avec une plateforme digitale destinée à facilité les échanges entre la famille et nos conseillers. Elle possède de nombreuses fonctions comme la possibilité de créer un album de vie partagée, ou encore de constituer une cagnotte en ligne. Pour finir, nous avons mis en place un mode de réservation d’obsèques minimalistes à bas prix. Il est accessible uniquement en ligne, pour Paris et le Pays Basque.